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Turquie-Émirats arabes unis : les raisons d’un rapprochement

Rivalité dans la Corne de l’Afrique, positions opposées s’agissant de l’Égypte, du Qatar, des conflits en Libye et en Syrie… Entre Ankara et Abou Dhabi, la mésentente était totale depuis neuf ans. Pourquoi se reparlent-ils aujourd’hui ?

Il y avait quelque chose de surréaliste à voir, ce 24 novembre, le prince héritier d’Abou Dhabi fouler le tapis bleu azur de Külliye, la présidence turque, et sourire de bon cœur à un Recep Tayyip Erdogan tout aussi jovial, devant une rangée d’officiers en uniforme ottoman.

Cela faisait en effet neuf ans que Mohamed Ben Zayed (MBZ) n’avait posé sa princière babouche sur le sol turc. Neuf ans que les relations bilatérales avaient tourné au vinaigre sur d’importants dossiers de politique étrangère. Rivalité dans la Corne de l’Afrique, positions diamétralement opposées s’agissant de l’Égypte, du Qatar, des conflits en Libye et en Syrie… Plus qu’une brouille, une détestation s’était installée entre les deux pays, relayée par leurs médias respectifs, sans toutefois que les échanges commerciaux en aient pâti. En septembre 2020, le président Erdogan avait même menacé Abou Dhabi d’une rupture diplomatique après que les Émirats (tout comme Bahreïn) eurent, sous le patronage de Donald Trump, signé les « accords d’Abraham » normalisant leurs relations avec Israël.

Le frère de MBZ en éclaireur

Changement de décor en janvier 2021. Anwar Gargash, le ministre émirati des Affaires étrangères, déclare alors qu’il « est temps de mettre fin aux disputes » avec « le premier partenaire » de son pays au Moyen-Orient. En avril, il s’entretient au téléphone avec son homologue turc, Mevlüt Çavusoglu.

Le 18 août, le conseiller à la sécurité nationale, Cheikh Tahnoun Ben Zayed Al Nahyan, qui n’est autre que le frère de MBZ, se rend à Ankara en éclaireur, avec, en poche, la promesse de faire de gros investissements dans une Turquie qui a un urgent besoin d’argent frais. L’on apprend simultanément, de la bouche du président Erdogan, que les services secrets des deux pays retravaillent ensemble « depuis quelques mois ».