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RDC: convocation de l’ambassadeur du Rwanda suite aux accusations de soutien de Kigali au M23

En République démocratique du Congo, une série de manifestations contre Kigali a débuté lundi 30 mai 2022 dans le pays. Les autorités ont finalement convoqué l’ambassadeur du Rwanda, ce mardi, pour tenter d’obtenir des explications sur le soutien de son pays aux rebelles du M23 dans l’est du pays. L’entretien entre le gouvernement et l’ambassadeur rwandais a été de courte durée. Environ une dizaine de minutes.

En l’absence du chef de la diplomatie congolaise, c’est sa collègue de l’Environnement et vice-Première ministre Ève Bazaiba qui s’est entretenue avec l’ambassadeur rwandais Vincent Karega, rapporte notre correspondant à Kinshasa, Pascal Mulegwa. Protocole oblige, elle a officiellement remis le message de protestation et de désapprobation du Gouvernement contre le soutien du Rwanda aux rebelles du M23.

« C’est une mise en garde sévère », a déclaré la ministre, sans plus de détails.

Même discrétion d’usage pour le diplomate rwandais dont l’expulsion est réclamée par la classe politique et la société civile après la mise en accusation de Kigali par Kinshasa.

« C’est aux deux pays d’estimer la nécessité et la durée de ma présence » sur le territoire congolais, a indiqué Vincent Karega.

Le rappel de son collègue congolais en poste à Kigali est réclamé, sur ce point le gouvernement congolais ne s’est pas encore prononcé. Kinshasa refuse pour le moment de fermer toutes les portes de la discussion.

Seule mesure conservatoire : la suspension des vols de la compagnie aérienne RwandAir sur le territoire congolais.

Kinshasa porte l’affaire à l’international. Dans une correspondance au Conseil de sécurité des Nations unies, le chef de la diplomatie congolaise, Christophe Lutundula, réclame une condamnation « sans équivoque et ferme » du Rwanda et du M23.

Le président de l’Assemblée nationale a pour sa part annoncé, ce mardi, que son institution entreprendra un périple diplomatique à travers le monde pour présenter aux États et organisations internationales, le mécontentement du peuple congolais, qui « désapprouve totalement le mauvais voisinage avec le Rwanda ».

Le ministre rwandais des Affaires étrangères trace des lignes rouges

Lors d’un point de presse à Kigali mardi, Vincent Biruta, le ministre des Affaires étrangères rwandais a assuré que son pays adhérait à la médiation régionale mise en place face à la montée des tensions avec son voisin congolais. Macky Sall, président en exercice de l’UA, a appelé de ses vœux un dialogue sous médiation angolaise pour régler les différents entre les deux pays autour de la résurgence du M23 dans l’est du Congo. Mais, tout en assurant que son pays est ouvert à la discussion, Vincent Biruta a également tracé des lignes rouges à ne pas dépasser, et porté de nouvelles accusations contre son voisin congolais.

Face à la presse, le chef de la diplomatie rwandaise n’a pas condamné directement la nouvelle insurrection du M23. « Dans cette région, il y aurait une centaine de groupes armés à condamner », a-t-il préféré répondre. Selon Kigali, ce sont surtout les FDLR, un groupe rebelle hutu opposé au régime de Paul Kagame qui posent aujourd’hui le plus gros problème. « Il y a des frustrations liées au fait que le gouvernement congolais n’a pas appliqué ses engagements au sujet de groupes armés qui tentent de déstabiliser le Rwanda. »

Aujourd’hui Kigali assure ne pas vouloir d’une crise et souhaiter continuer à discuter avec la RDC de manière bilatérale ou à travers différentes initiatives régionales. Mais le ministre des Affaires étrangères a aussi rappelé que des tirs venant du Congo ont atterri sur le sol rwandais ces dernières semaines. De nouvelles attaques de ce type seraient la limite à ne pas dépasser, dit-il. « Si les attaques continuent, le Rwanda aura le droit de répondre et de protéger la sécurité de ses citoyens. Et nous avons les moyens de faire cela. »

Vincent Biruta a également dénoncé une vague de discours haineux anti-rwandais en RDC et sur les réseaux sociaux, ainsi que des propos que le Rwanda considère comme des appels au génocide.

Une médiation angolaise dans le cadre de la CIRGL

L’Angola devrait entamer une médiation entre les deux pays dans les jours qui viennent, a indiqué dimanche le chef de l’État Sénégalais Macky Sall, président en exercice de l’Union africaine, qui s’inquiète du risque d’escalade. Mais une médiation angolaise a-t-elle une chance d’aboutir ? « Nous avons bon espoir d’arriver au moins à ce que les armes se taisent en attendant une solution politico-diplomatique », a confié la ministre sénégalaise des Affaires étrangères.

En tout cas lundi Kinshasa s’est dit prêt au dialogue, tout en continuant d’accuser son voisin. Quant au Rwanda, il s’est également dit ouvert à cette médiation, précisant que des contacts avaient déjà été pris.

L’Union africaine et Macky Sall ont été bien inspirés de désigner le président Angolais comme médiateur entre Kigali et Kinshasa, commente un analyste politique. Joao Lourenco est respecté dans la sous-région, précise cet analyste, il entretient de bonnes relations avec Paul Kagamé et Félix Tshisekedi -tout en restant neutre- et pourrait jouer un rôle, ajoute-t-il.

L’Angola a été particulièrement actif dans la résolution des conflits ces dernières années, s’imposant comme médiateur en Centrafrique ou bien comme facilitateur entre l’Ouganda et le Rwanda. D’ailleurs dès son investiture il y a cinq ans –rappelle cet autre chercheur angolais- Joao Lourenco a fait de la stabilité dans la région une priorité.