Plus d’une tonne de cocaïne a été saisie dans le port du Havre (Seine-Maritime) en juillet 2017. Six trafiquants havrais, qui auraient corrompu des dockers pour sortir la drogue des conteneurs et du port, sont jugés devant la cour d’assises spéciale de Douai (Nord) jusqu’au 16 février. Ils risquent jusqu’à trente ans de prison.
À partir de ce mercredi 1er février et jusqu’au 16 février, six Havrais sont jugés devant la cour d’assises spéciale du Nord, à Douai. Ils sont accusés d’avoir importé, en juillet 2017, 1,3 tonne de cocaïne de Colombie, du Brésil et de Républicaine dominicaine, selon la technique du « rip off » : la cocaïne est stockée dans des sacs de sport déposés à Carthagène (Colombie) dans des conteneurs chargés de pièces détachées d’engins agricoles, de cacao ou de protéines animales. Elle est récupérée dans le port du Havre avec la complicité de dockers.
Les six commanditaires jugés pour importation et trafic de stupéfiants en bande organisée, et association de malfaiteurs encourent la réclusion criminelle à perpétuité pour quatre récidivistes, les deux autres risquent trente ans de prison.
Des saisies multipliées par trois
Parmi les six accusés, Louis Bellahcene, chaudronnier invalide de 56 ans, dit « Doudou », « le vieux » ou « le daron », conteste être le principal commanditaire aux côtés de trentenaires et quadragénaires déjà condamnés qui ont grandi dans les quartiers difficiles du Havre. Louis Bellahcene soudoyait les dockers, chauffeurs, employés portuaires appâtés par des gains gigantesques et rapides de dizaines ou de centaines de milliers d’euros : 50 000 € pour le chauffeur routier ; 100 000 € pour recruter le chauffeur et fournir des documents nécessaires à la sortie d’un conteneur, 75 000 € pour seulement « autoriser » les sorties… Le kilo de cocaïne, acheté 1 000 €, peut être revendu 30 000 €. Dans le port du Havre, 10,5 tonnes ont été saisies en 2022 contre 7 tonnes en 2021. Trois fois plus qu’en 2019.
Séquestré et bâillonné par des agresseurs encagoulés
Depuis un signalement en janvier 2017, les policiers de la PJ de Rouen et son antenne du Havre surveillent et mettent sur écoute les commanditaires du trafic qui changent souvent d’adresse entre Le Havre et Honfleur. Après un an d’enquête, dix-huit trafiquants et complices sont interpellés dans un coup de filet, le 8 août. Quatre dockers qui menaient la grande vie – voyage en Thaïlande ou à Cuba, vêtements et voitures de luxe… – ont été condamnés ou relaxés en novembre 2021 par la même cour d’assises spéciale du Nord.
Les trafics génèrent de plus en plus de violence : enlèvements, séquestrations, règlements de comptes, manœuvres d’intimidation… Louis Bellahcene lui-même a été séquestré et bâillonné par des agresseurs encagoulés, qui lui réclamaient 600 000 €. Le 12 juin 2020, Allan Affagard docker de 40 ans,père de quatre enfants et délégué CGT mis en examen, harcelé de messages cryptés et roué de coups, avait été retrouvé mort sur un parking, à Montivilliers, près du Havre. L’instruction est toujours en cours. En quatre ans, aucun des trente séquestrés au Havre n’a déposé plainte