Benyamin Nétanyahou a opposé une fin de non-recevoir aux propositions du président visant à tempérer son très contesté projet de loi sur la Cour suprême.
Présentée mercredi 15 mars dans la soirée par le président israélien, Isaac Herzog, une ébauche de compromis sur le projet de réforme judiciaire qui divise le pays a été immédiatement rejetée par le gouvernement.
Depuis l’annonce, au début de janvier, du projet de réforme par le gouvernement le plus à droite de l’histoire d’Israël, des manifestations massives ont lieu toutes les semaines dans le pays, pour dénoncer ce que ses détracteurs qualifient de dérive antidémocratique. Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, et ses alliés estiment la réforme nécessaire pour rétablir un rapport de force équilibré entre les élus et la Cour suprême, qu’ils jugent politisée.
M. Herzog, qui joue un rôle essentiellement protocolaire, a annoncé, lors d’une intervention télévisée, avoir parlé avec des personnalités de la majorité et de l’opposition pour rédiger cette proposition de compromis. Ce texte, qualifié par le président de « compromis du peuple », propose notamment des changements sur les points les plus controversés de la réforme annoncée par la coalition au pouvoir.
Mardi, les députés ont adopté en première lecture un des textes de loi de la réforme durcissant les conditions permettant à la Cour suprême d’invalider une loi ordinaire et permettant au Parlement de prémunir une loi contre toute annulation par un processus législatif ne nécessitant qu’une majorité simple (61 députés sur 120).
« Compromis unilatéral »
Une nouvelle journée de mobilisation des opposants est annoncée pour jeudi, après de nouvelles manifestations mercredi. « Celui qui pense qu’une guerre civile est impossible n’a pas idée à quel point nous en sommes proches, mais je ne laisserai pas faire », a déclaré M. Herzog, ajoutant être convaincu que « la majorité des Israéliens veulent un compromis ». Le compromis proposé « doit servir de base de négociation et remplacer le projet actuel », a dit M. Herzog, qui ne cache pas son opposition au projet du gouvernement.
« En ce qui concerne le compromis du président, je pense que toute tentative de parvenir à un accord et à un dialogue est certainement bienvenue », a déclaré à la presse M. Nétanyahou, avant de s’envoler pour une visite officielle à Berlin. « Mais ce que le président propose n’a pas été accepté par les représentants de la coalition au pouvoir. Des points-clés de son programme ne font que perpétuer la situation existante et n’apportent pas l’équilibre requis entre les pouvoirs », a-t-il ajouté.
Dans un tweet lapidaire, Yossi Fuchs, secrétaire du gouvernement, a qualifié l’initiative présidentielle de « compromis unilatéral ». Sur Twitter, le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, a salué au contraire la proposition du président et annoncé vouloir « faire tous les efforts [nécessaires] pour éviter l’effritement économique, sécuritaire et social qui nuit gravement à l’unité nationale ».
« Base de négociations »
La proposition présidentielle survient deux jours après la présentation au Parlement d’un compromis rédigé par un ancien ministre de la justice, un directeur d’université et un professeur de droit, que le président de cette commission, Simcha Rothman, avait jugé pouvoir constituer « une base pour des négociations ».
Le projet de M. Herzog conserve l’idée du gouvernement d’empêcher la Cour suprême d’invalider une loi fondamentale, mais, contrairement au projet en cours d’examen au Parlement, propose que la Cour puisse continuer, sous certaines conditions, de retoquer un amendement à ces lois qui font office de Constitution en Israël.
Aux termes du projet présidentiel, la Cour pourrait retoquer une loi ordinaire à condition que se détache une majorité de huit juges sur un quorum de onze, quand le projet gouvernemental exige pour cela l’unanimité des quinze juges de la Cour.
M. Herzog propose également que toute nouvelle loi fondamentale soit adoptée à l’issue de quatre lectures, et avec une majorité qualifiée de 80 députés (sur 120) lors du quatrième vote, et non en trois lectures et à la majorité simple, comme c’est le cas actuellement.