Le secrétaire général de l’ONU s’inquiète également de « l’impasse » dans laquelle se trouve l’accord de paix entre l’Etat et des groupes armés du nord.
Dans un rapport destiné au Conseil de sécurité, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, presse la junte au pouvoir au Mali d’« accélérer » le rythme pour rendre le pouvoir à des civils élus début 2024, comme elle s’y est engagée.
Dans ce rapport consulté par l’AFP mardi 11 avril à la veille d’une réunion du conseil, M. Guterres s’inquiète aussi de la persistance des violences, de leur impact sur les populations et de « l’impasse » dans laquelle se trouve un important accord de paix entre l’Etat malien et des groupes armés du nord.
Le Mali est en proie à la propagation djihadiste et aux violences de toutes sortes depuis le déclenchement d’insurrections dans le nord en 2012. La violence s’est étendue au centre du pays, ainsi qu’au Burkina Faso et au Niger voisins. Elle progresse vers le sud. Une mission de stabilisation de l’ONU, la Minusma, est déployée au Mali depuis 2013, avec environ 13 800 soldats et policiers à ce jour.
La tourmente sécuritaire va de pair avec une profonde crise humanitaire et politique. Le Mali a été le théâtre de deux putschs depuis 2020 et est dirigé par une junte. Celle-ci s’est engagée, sous la pression internationale, à céder la place d’ici à mars 2024. Dans son rapport trimestriel, M. Guterres relève les « progrès » accomplis sur cette voie, comme la rédaction d’un projet de Constitution et la création d’une autorité de gestion des élections. Mais, ajoute-t-il, « du retard a été pris dans l’exécution de certaines activités essentielles » :
« A moins d’un an de la fin prévue de la transition, il incombe aux autorités maliennes de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour accélérer ce processus de sorte que l’ordre constitutionnel soit rétabli dans les délais convenus. »
Un « climat de méfiance profonde »
La junte vient d’annoncer le report sine die d’un référendum sur la Constitution. M. Guterres exprime sa préoccupation devant « l’impasse » ou la « paralysie persistante » où se trouve l’application de l’accord de 2015 dit d’Alger. La mise en œuvre de cet accord entre les groupes armés du nord et l’Etat est jugée primordiale pour la stabilisation du pays. Or les signataires, notamment les groupes touareg, sont à couteaux tirés avec la junte. M. Guterres parle de « climat de méfiance profonde » :
« Il est essentiel que les parties surmontent de toute urgence l’impasse actuelle compte tenu des conditions de sécurité qui règnent, en particulier dans le nord-est du Mali, où les groupes terroristes s’en prennent inlassablement aux civils, et de toutes les conséquences humanitaires liées à cette situation. »
Dans un mémorandum publié sur les réseaux sociaux, le gouvernement malien assure que « la mise en œuvre diligente du chronogramme de la transition demeure une priorité des autorités maliennes ». Il assure aussi rester « engagé et disponible pour la mise en œuvre diligente » de l’accord d’Alger.
Il remet en question le fondement des mises en cause de M. Guterres, selon lequel les forces maliennes ont commis des abus contre des civils lors d’opérations auxquelles a pris part « du personnel de sécurité étranger ». L’armée malienne s’adjoint le concours de centaines d’hommes décrits en fonction des sources comme des instructeurs de l’armée russe ou des mercenaires de Wagner, un groupe russe de sécurité privé aux agissements décriés.
Le gouvernement revendique une « amélioration de la situation sécuritaire » et « la neutralisation de centaines de terroristes » au cours des trois derniers mois. M. Guterres parle, lui, de conditions de sécurité toujours « précaires ». Il relève les restrictions imposées par les autorités maliennes aux déplacements aériens ou terrestres de la Minusma – une critique également rejetée par le gouvernement.