L’un des enjeux de ce scrutin, contesté par l’opposition et qui a été compromis dans plusieurs régions en raison de l’insécurité persistante, est de renforcer les pouvoirs du président. Les résultats sont attendus dans les soixante-douze heures.
C’est la première fois qu’ils votaient sur l’avenir de leur pays en crise depuis l’avènement des militaires, il y a trois ans. Environ 8,4 millions de Maliens étaient appelés à se prononcer sur une nouvelle Constitution, par référendum, « oui » ou « non », dimanche 18 juin, dont le but est de renforcer les pouvoirs du président. Cependant, la menace djihadiste et les désaccords politiques ont empêché la tenue du scrutin dans de nombreuses localités du nord et du centre du pays. Les résultats sont attendus dans les soixante-douze heures.
Avant la fermeture des bureaux de vote à 18 heures locales (20 heures à Paris) et le début du dépouillement, les électeurs se sont rendus en nombre dans les bureaux de vote de Bamako, a constaté un correspondant de l’Agence France-Presse (AFP) sur place. Le chef de la junte, le colonel Assimi Goïta, a été parmi les premiers à voter à Kati, près de Bamako. « Je suis convaincu que ce référendum ouvrira la voie à un Mali nouveau, un Mali fort, un Mali efficace, un Mali au service du bien-être de la population », a-t-il dit.
« Non-fonctionnement pour cause d’insécurité »
Reste que les remontées du reste de ce vaste pays indiquent que, comme prévu, les groupes armés du Nord ont fait barrage à la consultation dans la ville stratégique de Kidal et sa région. Les anciens mouvements rebelles signataires d’une paix fragile avec Bamako ont refusé d’y permettre l’acheminement du matériel électoral pour une consultation sur un projet où ils disent ne pas retrouver l’accord qu’ils ont signé en 2015.
Dans la région de Ménaka (au nord-est), qui subit depuis des mois la poussée de l’organisation Etat islamique, les opérations se sont limitées à la capitale régionale en raison de l’insécurité, ont rapporté des élus.
Un consortium d’observateurs nationaux de la société civile, la Modele-Mali, soutenu par l’Union européenne, a rapporté dans un communiqué « le non-fonctionnement pour cause d’insécurité » de plus de quatre-vingts bureaux de vote dans la région de Mopti, dans le centre, l’un des foyers de la violence qui ensanglante le Mali depuis 2012.
Il a fait état du transfert de plusieurs autres bureaux vers la ville de Bankass « pour raison d’insécurité ». Il a évoqué, sans plus de précision, une « attaque terroriste » qui a perturbé le vote à Bodio, toujours dans le centre.
Renforcement des pouvoirs présidentiels
La Constitution proposée fait la part belle aux forces armées. Parmi les changements par rapport à la Constitution de 1992, c’est surtout l’acceptation ou non d’un renforcement des pouvoirs présidentiels qui est l’un des enjeux de la consultation. Les détracteurs du projet le décrivent comme taillé sur mesure pour un maintien des militaires au pouvoir au-delà de la présidentielle prévue en février 2024, malgré leur engagement initial à rétrocéder la place aux civils après les élections. La victoire du oui paraît acquise.
Mais dans un environnement rendu difficilement déchiffrable par l’opacité du système et les restrictions imposées à l’expression, l’ampleur de cette victoire, la participation, bien que traditionnellement faible, et les conditions de déroulement du scrutin pourraient livrer des indications sur le soutien de la population à la junte et à son chef, le réputé populaire colonel Goïta, ainsi que sur la situation intérieure.
Les militaires qui ont pris le pouvoir par la force en 2020 et l’exercent sans partage revendiquent de faire reculer les djihadistes sur le terrain. Le vote a par ailleurs lieu moins de quarante-huit heures après le congé fracassant donné par Bamako à la mission de l’ONU après dix ans de présence. Les autorités estiment que la mission a failli et que le Mali peut assumer sa sécurité par ses « propres moyens ».