Le roi d’Espagne Felipe VI a désigné mardi 22 août le chef de la droite Alberto Núñez Feijóo pour tenter d’être investi premier ministre par les députés, a annoncé la présidente de l’Assemblée, bien qu’il n’ait pas la majorité requise pour l’instant.
Le roi a communiqué «sa décision de proposer monsieur Alberto Núñez Feijóo comme candidat à la présidence du gouvernement», a déclaré en conférence de presse la socialiste Francina Armengol, nouvelle présidente du Congrès des députés renouvelé lors des élections du 23 juillet.
Choix cornelien
La décision du roi était cornélienne et jusqu’ici très incertaine car ni Alberto Núñez Feijóo, ni le premier ministre socialiste sortant, Pedro Sanchez, ne peuvent se prévaloir actuellement de la majorité requise en raison des résultats des élections anticipées du 23 juillet. Francina Armengol a indiqué qu’elle contacterait Alberto Núñez Feijóo dans les prochaines heures afin de fixer une date pour le débat d’investiture.
À l’issue de leurs entretiens respectifs avec le roi mardi, MM. Sánchez et Feijóo, leader du Parti populaire (PP, droite), avaient tous deux réitéré qu’ils étaient prêts à se soumettre à un vote d’investiture si le choix du souverain se portait sur eux. Felipe VI, qui avait entamé ses entretiens lundi, a reçu mardi matin le chef du parti d’extrême droite Vox, puis Pedro Sánchez, avant de s’entretenir dans l’après-midi avec Alberto Núñez Feijóo.
Au premier tour, la majorité absolue de 176 voix (sur un total de 350 députés) est requise, alors qu’une majorité simple suffit au second tour. En cas d’échec du vote d’investiture, un compte à rebours de deux mois sera déclenché pour tenter de trouver une autre majorité, faute de quoi, des élections législatives seront de nouveau convoquées. Alberto Núñez Feijóo a répété qu’il revendiquait le droit de se soumettre à un vote d’investiture parce le PP a remporté le 23 juillet le plus grand nombre de sièges.
Mais il ne peut disposer au maximum que de 172 voix : celles des 137 députés du PP, plus les 33 de Vox et les députés de deux petits partis régionaux. Partant de ce constat, Pedro Sánchez estime que Alberto Núñez Feijóo n’a aucune chance et a longtemps estimé que le désigner pour se présenter devant les députés était une perte de temps. Il a toutefois déclaré mardi, après son audience avec le roi, qu’il n’aurait aucune objection si Felipe VI désignait Alberto Núñez Feijóo.
«Un plafond plus élevé»
«Quelle que soit la décision que prendra le chef de l’État, elle aura le soutien du Parti socialiste ouvrier espagnol», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse avant l’annonce de la décision du roi, tout en répétant qu’un vote d’investiture du leader du PP serait «un échec». «Il n’y a pas d’autre alternative qu’un gouvernement de progrès», a-t-il dit, c’est-à-dire une reconduction de la coalition sortante entre les socialistes et la gauche radicale.
Il a reconnu que Alberto Núñez Feijóo disposait d’un total assuré de 172 voix, mais, a-t-il dit, «il semble évident que nous avons un plafond plus élevé». Il se référait au fait que Francina Armengol avait été élue jeudi dernier à la présidence du Congrès au premier tour avec 178 voix grâce aux voix des députés des deux partis indépendantistes catalans, ERC et surtout Junts per Catalunya (JxCat). C’est cette majorité que Pedro Sánchez espère réunir lors d’un hypothétique vote d’investiture si Alberto Núñez Feijóo échoue, mais à l’heure actuelle, elle n’existe pas et Pedro Sánchez ne peut compter que sur 164 voix.
ERC et surtout Junts ont, en effet, souligné la semaine dernière qu’un vote d’investiture nécessiterait de nouvelles négociations pour laquelle ils ont placé la barre très haut. Leurs deux revendications principales portent sur un referendum d’autodétermination et sur une amnistie pour toutes les personnes inculpées après la tentative de sécession avortée de la Catalogne de 2017 qui contraignit Carles Puigdemont à fuir en Belgique pour échapper à la justice espagnole. Alberto Núñez Feijóo a affirmé être «à seulement quatre voix de la majorité absolue», alors que Pedro Sánchez, a-t-il dit, «est à la distance d’une amnistie» et «d’un referendum d’indépendance».