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Les Joueuses Espagnoles, titrées au Mondial, ne Veulent Plus Jouer Tant que le Président de la Fédération Reste en Place

Le président de la Fédération royale espagnole de football (RFEF) a refusé de quitter son poste, vendredi, malgré son agression sexuelle contre la numéro 10 de l’équipe nationale après la victoire de l’Espagne au Mondial féminin.

Les joueuses de l’équipe espagnole de football, sacrée championne du monde dimanche dernier, ont annoncé, vendredi 25 août, qu’elles refuseraient de rejouer pour la sélection sous la direction actuelle de la fédération, menée par Luis Rubiales, qui a embrassé de force la numéro 10, Jenni Hermoso, lors de la célébration du sacre de la Roja.

« Après tout ce qui est arrivé lors de la remise des médailles du Mondial féminin, toutes les joueuses signataires du présent texte n’honoreront pas une prochaine convocation si les dirigeants actuels sont maintenus », ont écrit les 23 championnes du monde dans un communiqué diffusé par le syndicat Futpro.

« Je n’ai à aucun moment consenti à ce baiser [que Luis Rubiales] m’a donné et je n’ai en aucun cas cherché à m’approcher du président. Je ne tolère pas qu’on mette en doute ma parole et encore moins que l’on invente des propos que je n’ai pas dits », a assuré Mme Hermoso dans un communiqué publié sur ses réseaux sociaux, contredisant ainsi la défense de M. Rubiales. « Je me suis sentie vulnérable et victime d’une agression, d’un acte impulsif et sexiste, déplacé et sans aucun consentement de ma part », a insisté l’internationale espagnole.

Plus tôt dans la journée, M. Rubiales a annoncé qu’il ne démissionnera pas de la présidence de la Fédération royale espagnole de football (RFEF). Dans son discours devant l’assemblée extraordinaire générale de cette dernière, il a déclaré : « Est-ce assez grave pour que je parte ? Je ne vais pas démissionner. » Cette dernière phrase, prononcée cinq fois d’affilée, a été ponctuée d’applaudissements. Sa décision a pris à revers l’Espagne, dont la presse pensait que l’homme de 46 ans démissionnerait.

M. Rubiales a présenté ses excuses, mais pas pour le baiser, qui était, selon lui, « spontané », « réciproque » et « consenti », mais pour « le contexte dans lequel il s’est produit ». Le patron du football espagnol a aussi dénoncé « le faux féminisme » qui « ne cherche pas la vérité », en fustigeant une « tentative d’assassinat social ». S’en prenant à plusieurs ministres et personnalités de gauche espagnols qui ont critiqué son geste et parlé de « violence sexuelle sans consentement », il a affirmé qu’il allait « se défendre » contre « ces gens qui tentent de m’assassiner publiquement ». « Mon Dieu, que vont penser les femmes qui ont vraiment subi des agressions sexuelles ? », a-t-il encore lancé.

« Rubiales ne peut rester à son poste »

En Espagne, embrasser quelqu’un sans son consentement est considéré comme un délit qui relève de la loi sur les agressions sexuelles. L’affaire pourrait aller en justice : Victor Francos, le président du Conseil supérieur des sports (CSD), un organisme gouvernemental, a promis que celui-ci prendrait des mesures si la RFEF ne le faisait pas. Il a assuré qu’il porterait l’affaire devant le Tribunal administratif du sport, une juridiction espagnole. Une initiative saluée par Irene Montero, ministre de l’égalité, qui écrit sur X (anciennement Twitter) : « Face [à l’impunité de M. Rubiales], le parquet et le CSD agissent pour protéger la joueuse, pour dire non au machisme et pour garantir le droit à la liberté sexuelle. »

Par ailleurs, le parquet espagnol a rapporté à l’Agence France-Presse avoir reçu quatre plaintes à l’encontre de M. Rubiales, mais, celles-ci n’ayant pas été déposées par les victimes elles-mêmes, il y a un doute concernant leur recevabilité.

« Ce que nous avons vu aujourd’hui à l’assemblée de la fédération est inacceptable (…). C’en est fini de l’impunité des actes machistes. Rubiales ne peut rester à son poste », a réagi Yolanda Diaz, ministre du travail, sur X, en exigeant des « mesures urgentes » de celui-ci. « La liste des femmes et des hommes offensés ces dernières années par Luis Rubiales est trop longue, cela doit cesser », a de son côté écrit , sur le même réseau social, Javier Tebas , président des deux premières divisions espagnoles de football.

« C’est inacceptable. Finissons-en. Je suis avec toi, collègue Jenni Hermoso », a  également écrit sur X  la footballeuse du FC Barcelone Alexia Putellas, Ballon d’or.

Quant à Luis Enrique, ancien sélectionneur de l’équipe espagnole masculine (2018, puis 2019-2022) et actuel entraîneur du Paris Saint-Germain, il a loué vendredi « le travail exceptionnel » de M. Rubiales à la tête de la RFEF, sans se prononcer sur le scandale du baiser forcé.

Procédure disciplinaire de la FIFA

Dans un premier temps, M. Rubiales avait balayé la polémique, estimant que ceux qui le critiquaient étaient « des cons ». Mais quelques heures plus tard il a présenté ses excuses, expliquant qu’il s’agissait d’un geste « sans aucune mauvaise intention », en ajoutant : « Si des gens ont été blessés, je dois m’excuser, il n’y a rien d’autre à faire. »

Cela n’a pas éteint l’embrasement : les politiques espagnols et les instances du foot avaient condamné tour à tour cette attitude, jusqu’au premier ministre, Pedro Sanchez, qui a estimé que « les excuses [de Luis Rubiales] sont insuffisantes » et « inappropriées ». L’indignation ne s’est pas bornée à l’Espagne puisque l’Américaine Megan Rapinoe, l’une des plus célèbres footballeuses au monde, ou encore Amnesty International, ont appelé à sa démission.

Le baiser forcé du président de la Fédération s’inscrit dans un contexte lourd au sein de la sélection espagnole. Des joueuses dénoncent depuis des mois les méthodes jugées « dictatoriales » du sélectionneur, Jorge Vilda, qui bénéficiait du soutien indéfectible de M. Rubiales. Le président de la fédération a par ailleurs été accusé d’avoir organisé des orgies avec l’argent de la RFEF en septembre dernier.