L’élection de cet élu de Louisiane, allié de Trump, met fin à une impasse de trois semaines qui a paralysé le Congrès. Le nouveau «speaker» a d’ores et déjà soumis un premier texte sur le soutien à Israël qui a été adopté.
Après trois semaines de chaos et de luttes intestines violentes, les Républicains sont enfin arrivés à élire un speaker à la Chambre des représentants. Mike Johnson, un obscur élu de Louisiane de 51 ans l’a emporté à l’unanimité. Cet ex-avocat ultra-conservateur jusqu’ici s’était fait connaître pour son rôle actif dans l’entreprise de manipulation du résultat des élections de 2020. Il a non seulement encouragé le président Trump à «rester fort et à continuer à se battre» pour garder le pouvoir après la victoire de Joe Biden. Mais il a été «le plus important architecte», selon le New York Times, de la bataille légale pour changer l’issue du scrutin et empêcher la passation de pouvoir. Et même après le rejet de sa plainte par la Cour suprême, il a contesté la certification des résultats le 6 janvier.
Mike Johnson, devenu aujourd’hui le troisième personnage de l’État, a refusé de répondre ces derniers jours aux questions des journalistes sur ce sujet. Pas étonnant qu’il ait reçu les félicitations de Donald Trump dès sa victoire. Il sera «un grand speaker», a assuré sur son réseau social l’ancien président. Ce père de famille de quatre enfants, est aussi un chrétien évangélique militant opposé au mariage gay, aux droits des LGBT et bien sûr à l’avortement qu’il voudrait faire interdire au plan fédéral. Avec sa femme, il anime un podcast religieux. Dans son discours après sa victoire, il a beaucoup mentionné Dieu et laissé entendre que c’était à lui qu’il devait cette promotion.
Speaker par défaut
Il était loin d’être le premier choix des Républicains. Après la destitution du speaker Kevin McCarthy par un petit groupe de conservateurs furieux qu’il ait voté une loi finance avec les démocrates, plusieurs candidats ont brigué le poste mais aucun n’a réussi à rassembler assez de voix, soit parce que trop modéré pour les trumpistes, soit trop extrémiste pour les modérés. S’il est aussi facile pour une faction de bloquer un candidat, c’est que les Républicains disposent d’une très faible majorité à la Chambre. Il suffit de quatre voix pour faire capoter une nomination. Mike Johnson est donc un speaker un peu par défaut. Il doit sa nomination au fait qu’il a moins d’ennemis que ses rivaux plus connus et semble plus consensuel. Même s’il est très à droite, c’est un personnage calme et posé. «Ce n’est pas un incendiaire», a résumé Kelly Armstrong, représentante du Dakota du Nord.
Sa candidature arrive également à un moment où les Républicains étaient prêts à tout pour trouver une solution qui mette un terme au spectacle peu reluisant de leurs guéguerres internes depuis des semaines. Dans son discours, le nouveau speaker a promis de travailler avec les démocrates et salué le travail de Kevin McCarthy. Sa tâche ne va pas être simple. Élu à la Chambre en 2016, il a peu d’expérience alors que les prétendants à ce
poste s’y préparent en général pendant des années. Il n’a jamais occupé une fonction de leadership à la Chambre, n’a aucune relation personnelle avec les leaders du Sénat ou Joe Biden et le numéro 2 et le numéro 3 du parti à la Chambre qui ont brigué le poste de speaker avant d’être évincés par l’aile trumpiste risquent de ne pas l’aider beaucoup. Surtout, il n’a ni les contacts, ni le carnet d’adresses de McCarthy pour organiser l’énorme collecte de fonds auprès des donateurs, une grosse fonction du speaker. Enfin, il va devoir diriger un groupe républicain profondément divisé après ses dernières semaines.
Un texte sur Israël voté dans la foulée
Cette élection ne met pas un terme au dysfonctionnement de la Chambre devenue quasiment ingouvernable à cause des différentes factions. Il suffit d’un élu pour déclencher un vote pour renverser le speaker. L’avantage de Johnson, c’est que c’est un allié du bloc trumpiste, ce qui devrait peut être lui donner plus de latitude pour gouverner alors que son prédécesseur McCarthy a été constamment obligé de négocier avec lui. Il a devant lui de sérieuses échéances. Dans un discours prononcé juste après le scrutin, il a promis que le premier texte qu’il soumettrait serait sur Israël, chose faite quelques heures après l’élection. «Le plus grand allié de notre pays au Moyen-Orient est attaqué. La première proposition de loi que je vais soumettre à cet hémicycle dans un petit moment sera en soutien à notre cher ami, Israël», a-t-il déclaré. Il lui faut aussi faire voter d’urgence avant le 17 novembre le budget. Et une aide à l’Ukraine… Or, Mike Johnson s’est opposé en mai avec une cinquantaine de conservateurs à allouer près de 40 milliards à l’Ukraine et s’est dit hostile à toute nouvelle aide.
Son élection signale en tout cas un virage encore plus à droite de la Chambre. «Si vous ne croyez pas que passer de Kevin McCarthy à MAGA (Make America Great Again, le slogan de Trump, NDLR) Mike Johnson suffit à montrer l’ascension de ce mouvement et où se trouve le vrai pouvoir du parti républicain, c’est que vous ne faites pas attention», a clamé Matt Gaetz, le représentant de Floride qui a conduit à la destitution de McCarthy.