L’ONU dénonce le risque d’« explosion » du nombre de décès d’enfants à Gaza, où la situation humanitaire est présentée comme « catastrophique ». L’État hébreu maintient, quant à lui, la pression sur Rafah, zone qualifiée par Netanyahou de « dernier bastion » du Hamas et où des bombardements se sont produits tout au long de la nuit.
La situation humanitaire reste catastrophique mardi 20 février 2024 dans la bande de Gaza où près d’un million et demi de Palestiniens s’entassent dans la ville de Rafah menacée d’assaut par Israël, au moment où une nouvelle impasse se profile au Conseil de sécurité de l’ONU quant à un possible cessez-le-feu.
Selon l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), près d’un million et demi de personnes se trouvent à Rafah, dont la population a été multipliée par six depuis le début de la guerre, le 7 octobre, entre Israël et le Hamas.
Cette ville située contre la frontière fermée avec l’Égypte est visée quotidiennement par des frappes de l’armée israélienne, qui a dit y préparer un assaut terrestre.
Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a qualifié Rafah de « dernier bastion » du Hamas et s’est dit déterminé à poursuivre l’offensive « jusqu’à la victoire complète ».
Dans la nuit de lundi à mardi, les bombardements israéliens se concentrent sur l’est de la bande de Gaza et la ville de Khan Younès.
Après environ vingt semaines de guerre, les rapports des organisations humanitaires sur la situation dans la bande de Gaza sont de plus en plus alarmants.
Neuf enfants sur dix malades à Gaza
Selon les agences de l’ONU, les denrées alimentaires et l’eau potable sont devenues « extrêmement rares » dans le territoire palestinien et 90 % des jeunes enfants y souffrent de maladies infectieuses.
« La bande de Gaza est sur le point d’assister à une explosion du nombre de décès évitables d’enfants, ce qui pourrait aggraver le niveau déjà insoutenable de décès d’enfants à Gaza », a déclaré Ted Chaiban, responsable adjoint de l’action humanitaire au sein de l’Unicef.
« Mes enfants meurent de faim, ils se réveillent en pleurant », a raconté à l’AFP une femme réfugiée dans un campement du nord de Gaza. « Où puis-je trouver de la nourriture pour eux ? »
Blocage en vue à l’ONU
La perspective d’assaut sur Rafah inquiète la communauté internationale. Vingt-six des 27 pays de l’Union européenne ont réclamé lundi une « pause humanitaire immédiate ». Mais les espoirs d’une trêve sont de plus en plus minces.
Le Conseil de sécurité de l’ONU doit se prononcer mardi sur un nouveau texte, préparé depuis des semaines par l’Algérie, exigeant un cessez-le-feu « immédiat ». Une résolution menacée par un nouveau véto des États-Unis, allié d’Israël, qui serait leur troisième depuis le début de la guerre.
Le projet, vu par l’AFP, « exige un cessez-le-feu humanitaire immédiat qui doit être respecté par toutes les parties ». Il s’oppose au « déplacement forcé de la population civile palestinienne », alors qu’Israël a évoqué une évacuation des civils avant une offensive terrestre à Rafah, et réclame la libération de tous les otages.
Les États-Unis ont prévenu que le texte algérien n’était pas acceptable. « Nous ne pensons pas que ce produit du Conseil améliorerait la situation sur le terrain, et donc si cette résolution est mise aux voix, elle ne passera pas », a répété lundi l’ambassadeur américain adjoint à l’ONU Robert Wood.
Projet alternatif américain
Les Américains estiment que cette résolution mettrait en danger les négociations diplomatiques délicates sur le terrain pour obtenir une trêve incluant une nouvelle libération d’otages.
Dans ce contexte, ils ont fait circuler un projet alternatif de résolution. Le texte évoque un « cessez-le-feu temporaire à Gaza dès que ce sera réalisable » et sur la base d’une « formule » incluant la libération de tous les otages.
Le projet américain s’inquiète d’autre part pour Rafah, prévenant qu’« une offensive terrestre d’ampleur ne devrait pas avoir lieu dans les conditions actuelles ».
Selon une source diplomatique, ce projet alternatif n’a aucune chance d’être adopté en l’état, notamment en raison du risque d’un véto russe.
Le Conseil de sécurité, largement divisé sur le dossier israélo-palestinien depuis des années, n’a pu adopter depuis le 7 octobre sur ce dossier que deux résolutions, essentiellement humanitaires. Sans grand résultat, l’entrée de l’aide à Gaza restant largement insuffisante.
Craintes pour un bébé otage
Israël s’interroge sur le sort de la famille Bibas, une mère et deux enfants dont un bébé, capturée le 7 octobre par les commandos du Hamas.
« Nous craignons pour leurs vies », a déclaré Daniel Hagari, porte-parole de Tsahal, après la projection par l’armée d’images montrant selon lui Shiri Bibas, de dos et entourée de sept hommes armés dans la bande de Gaza, le jour de leur capture.
Ces images datent du 7 octobre et proviennent d’une caméra de rue à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, à quelques kilomètres du kibboutz israélien de Nir Oz où ils ont été enlevés, a-t-il précisé.
Kfir Bibas, le plus jeune otage israélien détenu par le Hamas, avait moins de neuf mois lorsqu’il a été arraché de son lit le 7 octobre à Nir Oz.
Le mouvement islamiste a annoncé en novembre la mort du bébé, de son frère et de sa mère, prétendument tués par un bombardement israélien. Mais les autorités israéliennes ne l’ont pas confirmée.
Dans un communiqué publié lundi, la famille Bibas a appelé « les décideurs, en Israël et dans le monde, impliqués dans les négociations (pour leur libération) à les ramener à la maison maintenant ». « Kidnapper des enfants est un crime contre l’humanité et un crime de guerre, Ariel et Kfir sont les victimes d’un mal monstrueux », a-t-elle ajouté.
Le Premier ministre israélien a déclaré que ces images « nous rappellent avec qui nous avons affaire, avec des cruels kidnappeurs de bébés ». « Nous traînerons en justice ces kidnappeurs de bébés et de mamans ».
Dans un communiqué publié lundi soir en réponse au message de l’armée, un groupe militaire allié au Hamas a réitéré que la mère et les deux enfants avaient été tués par « un bombardement israélien », après avoir été « détenus pendant 20 jours ».
Il a jugé que M. « Netanyahou et son gouvernement » étaient « responsables de la mort de (ces trois membres de) la famille Bibas », en accusant le Premier ministre israélien de « chercher à se débarrasser » des autres otages « en les visant délibérément ».
Le Hamas avait diffusé une vidéo du père des enfants, Yarden Bibas, lui aussi enlevé le 7 octobre, après avoir annoncé la mort du reste de la famille.