L’émissaire des Nations Unies pour la Libye Abdoulaye Bathily a démissionné mardi 17 avril, estimant que l’Onu ne peut « agir avec succès » pour soutenir le processus politique face à des dirigeants qui placent « leurs intérêts personnels au-dessus des besoins du pays ».
Le diplomate et ex-ministre sénégalais Abdoulaye Bathily, neuvième émissaire onusien depuis 2011, a jeté l’éponge à l’issue d’une réunion du Conseil de sécurité où il a dressé un taleau très sombre de la situation en Libye.
Le pays est déchiré par une guerre civile depuis 2011 et la chute du régime de Mouammar Kadhafi. Il est gouverné par deux exécutifs rivaux, l’un à Tripoli (Ouest) dirigé par Abdelhamid Dbeibah et reconnu par l’Onu, l’autre dans l’Est affilié au camp du maréchal Haftar, dont le fief est à Benghazi.
En août 2023, Bathily avait déjà appelé à la responsabilité politique et morale des dirigeants libyens pour clore l’arrangement intérimaire à durée indéterminée, sortir de l’impasse actuelle et cesser d’entraver l’aspiration légitime des Libyens aux élections et à la paix
.
Égoïsme des dirigeants
La mission d’appui des Nations unies en Libye (Manul) a fait beaucoup d’efforts ces 18 derniers mois sous ma direction
, mais ces derniers mois, la situation s’est détériorée
, a décrit Abdoulaye Bathily, dénonçant le manque de volonté politique et de bonne foi des dirigeants libyens qui sont contents de l’impasse actuelle
.
C’est très triste, parce qu’en Libye aujourd’hui, l’essentiel de la population veut sortir de cette galère.
Lors de la réunion du Conseil de sécurité de mardi, l’émissaire démissionnaire a annoncé le report de la conférence nationale de réconciliation inter-libyenne prévue le 28 avril, à une date indéterminée. Il est décourageant de voir des individus en position de pouvoir mettre leurs intérêts personnels au-dessus des besoins de leur pays
, a-t-il lancé, partageant son profond sentiment de déception
.
La détermination égoïste des dirigeants actuels à maintenir le statu quo par des manœuvres et tactiques dilatoires, aux dépens du peuple libyen, doit stopper
, a-t-il plaidé.
Impact régional
Selon le désormais ex-émissaire, la présence d’acteurs armés et d’armes lourdes à Tripoli est très préoccupante, car elle constitue une menace importante pour la sécurité de la population civile
.
De même, la militarisation continue des acteurs armés dans les trois régions et les manœuvres militaires des forces armées libyennes près de la ligne de cessez-le-feu à l’est de Syrte posent un risque pour l’accord de cessez-le-feu. Toute escalade en Libye exacerberait l’instabilité non seulement au Tchad, au Niger et au Soudan, mais aussi dans l’ensemble du Sahel
, a-t-il averti.