Des policiers en tenue antiémeute sont intervenus dans la nuit de mardi à mercredi pour séparer les deux camps et repousser les contre-manifestants venus sur le campus de l’université pour en découdre.
Gaz lacrymogènes, feux d’artifice, bâtons… La mobilisation étudiante propalestinienne aux États-Unis a connu à Los Angeles un épisode de violence inédit depuis le début de ce mouvement dénonçant la guerre à Gaza.
Des heurts ont éclaté dans la nuit de mardi à mercredi à l’université UCLA, après que des contre-manifestants s’en sont pris aux militants propalestiniens qui occupent certaines parties du campus depuis plusieurs jours.
Un campement propalestinien largement pacifique, installé à UCLA la semaine dernière, a été attaqué par des contre-manifestants peu avant minuit (heure locale). Des vidéos montrent le camp assiégé par des dizaines de personnes masquées et cagoulées semblant vouloir briser les barricades.
Plusieurs d’entre elles brandissent de longs bâtons : au moins une personne du camp est frappée à la tête avant de tomber au sol.
« Du spray au poivre, des gaz lacrymogènes, des planches, des briques, des feux d’artifice – pas des pétards – ont été tirés directement sur les étudiants », a affirmé à la chaîne CNN Vincent Doehr, doctorant en sciences politiques à UCLA et responsable pour les manifestants des relations avec les médias.
« Ils nous jetaient des pavés, des tuyaux, ils arrachaient les plaques de bois pour les lancer sur nous », a raconté à l’AFP Kaia Shah, une autre porte-parole. « À chaque fois que ceux qui essayaient de les retenir avaient leur tête exposée, ils nous giflaient, nous frappaient. » Selon elle, 25 étudiants ont été hospitalisés.
La police est-elle intervenue ?
Les forces de sécurité d’UCLA sont arrivées environ deux heures après le début des heurts, mais ne sont pas intervenues dans un premier temps, a constaté un journaliste de l’AFP. Des policiers en tenue antiémeute ont séparé les deux camps vers 3 heures locales, repoussant les contre-manifestants.
« La réaction limitée et tardive des forces de l’ordre du campus à UCLA la nuit dernière est inacceptable et exige des réponses », a réagi mercredi le gouverneur démocrate de Californie, Gavin Newsom. Une unité de police de l’État de Californie a dû être déployée face à l’incapacité des agents sur le campus, a-t-il ajouté.
Angus Johnston, historien spécialiste du militantisme étudiant aux États-Unis à l’université Hostos de New York s’inquiète : « la raison pour laquelle la situation à l’UCLA est si perturbante est qu’on a déjà connu ça dans le passé, quand la police et des politiciens permettent que des extrémistes de droite attaquent des organisateurs de gauche », dit-il à l’AFP, évoquant « le mouvement pour les droits civils » et celui « contre la guerre du Vietnam ». La police du campus n’a pas répondu aux sollicitations de l’AFP.
Une cinquantaine de professeurs d’UCLA ont dénoncé mercredi la responsabilité de la direction. « L’université a créé une situation dangereuse qui est allée crescendo la nuit dernière », a souligné Graeme Blair, un professeur de sciences politiques. « Ils autorisent les contre-manifestants à se trouver à moins de 20 pieds (6 mètres) de ce campement », a-t-il regretté, en estimant que les contre-manifestations pourraient être autorisées ailleurs sur le campus.
Les anti-manifestants sont-ils pro-israéliens ?
Selon plusieurs témoins, certains des contre-manifestants portaient des drapeaux israéliens, mais ne semblaient pas être des étudiants. Ils ajoutent que beaucoup d’entre eux sont passés sur le campus à plusieurs reprises.
« Dès le premier soir, (les personnes présentes sur le camp) ont été harcelées par des groupes de plus en plus importants de contre-manifestants », a affirmé à la BBC Dylan Winward, journaliste au Daily Bruin, le journal du campus.
Les agresseurs cagoulés et masqués semblaient avoir « entre 20 et 35 ans et ne ressemblaient pas à des étudiants ou à des personnes ayant le moindre lien avec l’université », a raconté à l’AFP Daniel Harris, un étudiant en jazz de 23 ans, ajoutant n’avoir reconnu aucun des « étudiants juifs qui soutiennent Israël » qu’il connaît.
Selon la professeure Elizabeth O’Brien, des « provocateurs venus de l’extérieur » scandant des slogans tels que « USA ! USA ! » ou « Fake News » sont à l’origine des violences. Les heurts semblent avoir duré plusieurs heures. Selon les ambulanciers, un homme d’une vingtaine d’années a été transporté à l’hôpital pour un traumatisme crânien.
Au lendemain d’une nuit agitée, un calme relatif règne sur le campus mercredi, avec une forte présence policière. À l’intérieur du campement, soit une centaine de tentes, des étudiants propalestiniens sont toujours rassemblés. Les cours ont été annulés et la direction a publié un communiqué indiquant qu’elle a ouvert « une enquête approfondie pouvant conduire à des arrestations, des expulsions et des licenciements. »