La plus haute juridiction de l’ONU a ordonné à Israël de cesser son offensive sur Rafah et de maintenir ouvert le passage vers l’Égypte.
L’armée israélienne bombardait samedi la bande de Gaza, y compris Rafah, au lendemain d’une décision de la Cour internationale de Justice .(CIJ) lui ordonnant de suspendre ses opérations dans ce secteur sur fond d’efforts à Paris pour arracher un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas. Le Figaro fait le point sur la situation.
Frappes israéliennes sur Rafah après une décision de la CIJ
La CIJ, plus haute juridiction de l’ONU dont les décisions sont juridiquement contraignantes mais qui manque de mécanismes pour les mettre en œuvre, a ordonné à Israël cesser son offensive sur Rafah et de maintenir ouvert le passage vers l’Égypte, essentiel à l’entrée de l’aide humanitaire mais fermé après le lancement de son opération terrestre début mai. Israël s’est défendu en affirmant qu’il n’avait «pas mené et ne mènera pas d’opérations militaires dans la zone de Rafah qui créent des conditions de vie susceptibles de conduire à la destruction de la population civile palestinienne, en tout ou en partie».
Le mouvement islamiste palestinien Hamas, en guerre contre Israël et au pouvoir à Gaza depuis juin 2007, a salué la décision de la CIJ tout en déplorant qu’elle se limite «seulement à Rafah». Dans la foulée de la décision vendredi de la CIJ, les bombardements israéliens se sont poursuivis dans la bande de Gaza. Idem pour les affrontements de l’armée israélienne avec la branche armée du Hamas. Tôt samedi, des témoins palestiniens et des équipes de l’AFP ont fait état de frappes israéliennes à Rafah (sud), ville à la lisière de l’Égypte, mais aussi à Deir al-Balah (centre).
Pourparlers à Paris
Saisie par l’Afrique du Sud qui accuse Israël de «génocide», la Cour a non seulement ordonné un cessez-le-feu immédiat à Rafah, l’ouverture du poste-frontière éponyme pour permettre l’entrée de l’aide humanitaire, mais aussi la «libération immédiate et inconditionnelle» des otages retenus par le Hamas à Gaza. Plus tôt dans la semaine, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) avait demandé l’émission de mandats d’arrêt contre des dirigeants du Hamas et israéliens, parmi lesquels Benyamin Netanyahou, pour des crimes présumés commis en Israël et dans la bande de Gaza.
Si le gouvernement israélien a fustigé l’annonce du procureur, il a néanmoins ordonné à ses négociateurs de «retourner à la table des négociations pour obtenir le retour des otages», selon un haut responsable. Début mai, des négociations indirectes entre Israël et le Hamas, par l’entremise du Qatar, de l’Égypte et des États-Unis, n’avaient pas abouti à un accord de trêve associée à la libération d’otages et de prisonniers palestiniens détenus par Israël.
Le chef de la CIA, William Burns, est attendu à Paris vendredi ou samedi pour tenter de relancer les pourparlers sur une trêve à Gaza, a appris l’AFP de source occidentale proche du dossier. Le président français Emmanuel Macron a reçu vendredi le premier ministre du Qatar et les ministres saoudien, égyptien et jordanien des Affaires étrangères «pour faire pression en faveur d’un cessez-le-feu», selon Le Caire. Selon la présidence française, les dirigeants ont discuté, à l’Élysée, de la mise en œuvre de la «solution à deux États», soit un État de Palestine viable aux côtés d’Israël. L’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont annoncé récemment reconnaître l’État de Palestine.
Les dirigeants ont aussi parlé de «l’ensemble des leviers qui pouvaient être activés afin d’obtenir la réouverture de tous les points de passage» vers ce territoire palestinien et examiné comment «augmenter et approfondir leur coopération en matière d’aide humanitaire».
Situation humanitaire alarmante
En parallèle, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken s’est entretenu avec Benny Gantz, membre du cabinet de guerre israélien, des nouveaux efforts pour en arriver à un cessez-le-feu et rouvrir le «plus tôt possible» le terminal de Rafah, a indiqué Washington. La situation sécuritaire et humanitaire dans le territoire demeure alarmante avec un risque de famine, des hôpitaux hors service et environ 800.000 personnes, selon l’ONU, qui ont fui Rafah ces deux dernières semaines.
«Nous sommes à un moment charnière», a résumé dans la nuit le chef des opérations humanitaires de l’ONU, Martin Griffiths. «Les travailleurs humanitaires et le personnel des Nations unies doivent pouvoir effectuer leur travail en toute sécurité (…) à l’heure où la population de Gaza s’enfonce dans la famine». Dans ce contexte, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi s’est engagé, dans un échange téléphonique avec Joe Biden, à «laisser passer l’aide humanitaire» de l’ONU pour Gaza via le point de passage israélien de Kerem Shalom, selon la Maison Blanche.