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[Texte / Vidéo]Revivez le discours du Chef de l’Etat, Bassirou Diomaye Faye à l’occasion de la cérémonie d’ouverture du dialogue national sur la réforme et la modernisation de la justice

  • Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,
  • Madame la Présidente du Haut Conseil des Collectivités territoriales,
  • Monsieur le Président du Conseil économique social et environnemental,
  • Madame la Présidente du haut Conseil du dialogue social,
  • Monsieur le Président du Conseil constitutionnel,
  • Monsieur le Premier Président de la Cour suprême,
  • Monsieur le Procureur général près ladite Cour,
  • Mesdames, messieurs les anciens Chefs de la juridiction suprême,
  • Monsieur le Médiateur de la République,
  • Messieurs les Officiers généraux,
  • Monsieur le Président de l’Union des Magistrats du Sénégal,
  • Monsieur le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats,
  • Mesdames, Messieurs les membres de la communauté universitaire,
  • Mesdames, Messieurs les officiers ministériels et auxiliaires de justice,
  • Mesdames, messieurs les leaders de partis, coalitions de partis politiques et candidats à la dernière élection présidentielle, 
  • Mesdames, Messieurs les représentants des autorités religieuses et coutumières, du patronat, des centrales syndicales et de la société civile,
  • Chers invités, en vos rangs, titres et qualités,

Je tiens tout d’abord à exprimer ma profonde gratitude à chacun d’entre vous pour avoir répondu favorablement à notre invitation à l’occasion de cette Journée nationale du dialogue.

Cette cérémonie qui nous rassemble s’inscrit harmonieusement dans nos vieilles traditions socio culturelles de diiso, que nous perpétuons au sein de nos familles et de nos communautés.

Fidèle à cet héritage de longue date, j’ai tenu à maintenir dans le calendrier républicain la date symbolique du 28 mai consacrée au dialogue national.

En accord avec l’esprit de mon discours d’investiture, de mon message à la nation à l’occasion de la fête de l’indépendance, et de mes orientations au Conseil des Ministres du 9 avril, je réitère aujourd’hui la priorité élevée que j’accorde à la concertation comme mode de gouvernance des affaires publiques.

Je demeure en effet convaincu que la vertu préventive du dialogue en temps de paix éloigne le spectre des tensions et favorise les dynamiques consensuelles, consolidant ainsi notre démocratie et assurant la stabilité indispensable au développement économique et social, dans l’intérêt supérieur de la nation.   Dialoguer en temps de paix, en partageant la part d’humanité qui existe en chacun de nous, est un examen à l’aune duquel une nation mesure sa grandeur..

C’est tout le sens de cette Journée dont le thème porte sur la réforme et la modernisation de la Justice.

La problématique et l’urgence d’y faire face nous interpellent tous, au-dessus de toute considération partisane. La grande diversité des acteurs ici présents en témoigne.

De plus, pour faire de cette concertation un cadre inclusif le plus large possible, nous avons lancé, le jeudi 23 mai, la plateforme Jubbanti : comme vox populi pour recueillir les contributions citoyennes : sa gis-gis ci doxaliinu yoon.

La justice étant rendue au nom du peuple, il est donc pertinent que le peuple ait son mot à dire sur la manière dont elle doit être rendue.

Au demeurant, je rappelle que déjà en avril 2018, le besoin de modernisation de la justice avait fait l’objet d’un rapport d’un Comité de concertation, mis en place par le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice.

Six années après ces concertations et après avoir été traversé par de violentes secousses, force est de reconnaître que notre système judiciaire a besoin d’une profonde refondation que seule une approche inclusive permettra de réussir.

Œuvre collectivedémarche participative et exercice de co construction : voilà le triptyque qui doit guider notre action.

Sous ce rapport, je voudrais particulièrement insister sur le fait que nous n’ouvrons donc pas ici un procès en inquisition, pour désigner un ou des coupables à jeter aux orties.

Il est plutôt question de tenir un débat lucide et sereinposé et apaisé, pour ausculter notre système judiciaire, identifier ses forces et faiblesses, et rechercher ensemble les solutions aptes à refonder son fonctionnement et améliorer ses performances.

Je ne reviendrai pas ici sur les principes fondamentaux de la justice dans un Etat de droit, sinon pour en rappeler la quintessence, à savoir : la séparation des pouvoirs, l’indépendance, l’impartialité et l’intime conviction du juge, l’égalité de tous devant la loi, la présomption d’innocence, le principe du contradictoire, le droit à un procès équitable et l’habeas corpus, bouclier contre les arrestations et détentions arbitraires.

En rappelant ces principes, énoncés et encadrés par des textes légaux et règlementaires, j’ai en même temps conscience qu’ils ne suffisent pas à eux seuls pour jauger l’indépendance, la crédibilité et l’efficacité d’un système judicaire.

En effet, quelle que soit la pertinence des textes, c’est d’abord et surtout à l’aune de la pratique qu’on peut juger si un système judiciaire répond aux idéaux et exigences de l’Etat de droit.

Voilà pourquoi nous voulons, à travers ces assises, interroger notre système judiciaire en revisitant ses règles et mécanismes, afin de le perfectionner et le hisser à la hauteur de nos ambitions et des aspirations de notre peuple.

Les thématiques qui seront débattues incluent notamment le statut des magistrats, l’organisation et le fonctionnement du Conseil supérieur de la Magistrature, la dématérialisation du service public de la justice, la justice et le numérique, le temps du procès pénal, le régime de la sanction pénale, le cadre juridique et institutionnel de l’administration pénitentiaire, les conditions de détention et de préparation à la réinsertion sociale des détenus, le régime de la privation de liberté, la prise en charge des enfants en danger ou en conflit avec la loi.

La finalité de cet exercice est de nous aider à baliser la voie pour une réforme pragmatique de notre système judiciaire, afin qu’il inspire davantage confiance au justiciable et préserve sa dignité.

Pour ce faire, nous devons travailler à :

  • Mettre en place un système plus transparent de gestion de la carrière des magistrats ;
  • Définir un régime de privation de liberté mieux encadré ;
  • Aménager un dispositif législatif et institutionnel de nature à favoriser la célérité dans le traitement des procédures judiciaires et humaniser l’univers carcéral ;
  • Instituer des plateformes dématérialisées et fonctionnelles ;
  • Et améliorer le fonctionnement du système par l’allocation de moyens budgétaires suffisants et la poursuite du programme de construction et de réhabilitation des infrastructures.

Il convient aussi de rappeler que pour bâtir l’Etat de droit que nous voulons, la réforme et la modernisation du système judiciaire ne doivent pas seulement se limiter au volet pénal, qui, il est vrai, polarise plus notre attention collective.

Nous ne devons pas oublier les affaires civiles, dont la matière commerciale constitue une composante majeure, le droit du travail et le contentieux administratif ; autant de domaines dont la prise en charge conditionne le fonctionnement de la justice.

En portant nos réflexions sur tous les sujets à l’ordre du jour, je souhaite que nos échanges s’inscrivent dans une démarche pragmatique et répondent à la finalité de l’exercice.

Mais, ce faisant, gardons-nous de vouloir instaurer une République des juges qui remettrait en cause le principe cardinal de la démocratie : le gouvernement du peuple, par et pour le peuple, en vertu duquel les élus restent les dépositaires légitimes du pouvoir étatique.

Je suis confiant que nous pouvons y parvenir, par une concertation sereine, ouverte et apaisée.

Sur ce, je déclare ouverte la Journée nationale du dialogue, et souhaite plein succès à nos travaux. Je vous remercie de votre aimable attention.