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Guerre en Ukraine : quels sont les enjeux du sommet sur la paix organisé ce week-end en Suisse ?

Ukraine's President Volodymyr Zelensky reacts during a joint press conference with Belgian Prime Minister after signing a bilateral security accord in Brussels on May 28, 2024. Zelensky visits Belgium to ink the latest in a string of security accords with Western allies. Belgium committed to delivering 30 F-16 fighter jets by 2028 to help Kyiv battle Russia's invasion. (Photo by KENZO TRIBOUILLARD / AFP)

90 États et organisations sont attendus en Suisse samedi et dimanche à la conférence pour la paix en Ukraine. En quête d’un plus large soutien international, Volodymyr Zelensky devra composer sans la présence de la Russie et de nombreux pays du Sud.

Cérémonies du Débarquement, visite d’Etate en France, tournée au Moyen-Orient, G7 en Italie… Volodymyr Zelensky, arrivé ce vendredi en Suisse, a effectué une tournée diplomatique éclair ces dernières semaines pour courtiser la communauté internationale, au-delà ses alliés occidentaux, et accroître la pression sur la Russie.

En point d’orgue de ces multiples déplacements, le sommet sur la paix en Ukraine qui se déroule samedi et dimanche en Suisse, dans le luxueux complexe hôtelier du Burgenstock, perché sur une montagne. Kiev espère obtenir à cette « Conférence de haut niveau sur la paix » un large soutien international en faveur de son plan visant à mettre fin à la guerre déclenchée par l’invasion russe  en Ukraine en février 2022.

« Il y aura deux jours de travail actif avec des pays de toutes les régions du monde, avec des nations différentes qui sont néanmoins unies par l’objectif commun de rapprocher l’Ukraine d’une paix juste et durable », a expliqué le président ukrainien sur le réseau social X.

Les discussions porteront sur les questions de sécurité nucléaire, de sécurité alimentaire et sur le retour des prisonniers de guerre et des enfants ukrainiens emmenés sur le territoire sous contrôle russe. Ces thèmes « ne sont pas les plus délicats mais ils sont néanmoins importants », a dit à l’AFP le directeur de l’institut de recherche Swisspeace, Laurent Goetschel. L’objectif du sommet, demandé par Kiev, est d’ « inspirer un futur processus de paix », mais l’issue de la rencontre reste incertaine.

Un élargissement du soutien à Kiev ?

Les représentants de 92 pays et 8 organisations doivent participer à ce sommet. Au total, une centaine de délégations doivent être présentes, dont 57 chefs d’État et de gouvernement de toutes les régions du monde, ont annoncé vendredi soir les autorités suisses. Le président français Emmanuel Macron, la vice-présidente américaine Kamala Harris ou encore le chancelier allemand Olaf Scholz seront de la partie. Environ la moitié des dirigeants seront des Européens.

Parmi les membres du groupe des Brics (cinq pays émergents) dont fait partie la Russie, seul le Brésil a confirmé publiquement sa participation, consentant à envoyer son ambassadrice en tant qu’observatrice. La Chine, proche alliée du Kremlin, a fait savoir que les pourparlers n’avaient de sens que si la Russie et l’Ukraine y participaient. L’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud jugent également difficile d’y être sans Moscou.

Habituellement mesuré dans ses critiques vis-à-vis de Pékin, Zelensky n’a cette fois pas mâché ses mots, accusant le gouvernement chinois d’avoir usé de son influence diplomatique pour dissuader les pays du Sud de se rendre en Suisse. « Malheureusement, la Chine s’efforce aujourd’hui d’empêcher des pays de venir au Sommet pour la paix », avait regretté le dirigeant ukrainien le 2 juin dernier. À noter, en revanche, la présence de la Turquie, importante médiatrice entre Kiev et Moscou.

La Russie aux abonnés absents

L’Ukraine, comme ses alliés occidentaux, jugeait néfaste que soit représenté l’auteur de l’invasion de février 2022. Les deux parties n’ont pas eu de discussions directes depuis les premières semaines de la guerre. La Russie a indiqué à plusieurs reprises qu’organiser un sommet sans sa participation n’avait « aucun sens » et fustigé la « formule de paix » avancée par Volodymyr Zelensky, qui prévoit pour l’essentiel un retrait des troupes russes du territoire ukrainien, des réparations financières de la part de Moscou et la création d’un tribunal spécial pour juger les responsables russes.

Vladimir Poutine a, ce vendredi, qualifié de « stratagème pour détourner l’attention » des vraies responsabilités dans le conflit – selon lui celles de l’Ukraine et des Occidentaux – le sommet pour la paix prévu en Suisse. Compliqué dès lors, sans la présence de l’un des deux belligérants, d’avancer vers un hypothétique plan de paix.

D’autant plus que les positions des deux camps semblent figées. Vladimir Poutine a de facto fixé vendredi une capitulation de l’Ukraine comme condition pour des pourparlers. Le dirigeant russe a insisté sur le fait que l’Ukraine devait remettre à la Russie la totalité de quatre régions de l’Est et du sud de l’Ukraine, alors même que Moscou ne les occupe que partiellement et que les combats y font toujours rage.

Son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté aussitôt un « ultimatum » à la « Hitler ». « Ces messages sont des messages d’ultimatum (…) Hitler faisait la même chose, quand il disait Donnez-moi une partie de la Tchécoslovaquie et on en reste là, mais non, ce sont des mensonges », a commenté de son côté le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans un entretien à la chaîne d’information italienne SkyTG24 en marge d’un sommet du G7. « Le nazisme est là, et il a désormais le visage de Poutine », a-t-il ajouté.

Dans la suite du G7

Ce sommet en Suisse se déroulera dans la continuité du G7, qui s’est ouvert jeudi dernier en Italie. Ses membres (États-Unis, Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni, Canada, Japon) ont promis vendredi de soutenir l’Ukraine « autant qu’il le faudra », selon un projet de déclaration commune.

Vladimir Poutine a dénoncé la décision jeudi du G7 de garantir un prêt de 50 milliards de dollars à l’Ukraine avec les futurs intérêts des actifs russes gelés depuis le début de l’offensive russe. « Même si on enjolive les choses, le vol ça reste du vol et ça ne restera pas impuni », a-t-il dit. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a réclamé la confiscation pure et simple des 300 milliards d’euros d’actifs de la banque centrale russe gelés par les Occidentaux depuis deux ans, ce à quoi ils se refusent pour des raisons juridiques.

Au cours de ce sommet, Joe Biden et Volodymyr Zelensky ont signé un accord bilatéral de sécurité sur 10 ans. L’accord « stipule que les États-Unis soutiennent la future intégration de l’Ukraine dans l’Otan et reconnaît que notre accord de sécurité ouvre la voie à l’intégration de l’Ukraine dans l’Otan », a souligné le président ukrainien.