En 1980, ce pilote syrien nommé Ragheed al-Tatari a pris une décision qui allait changer le cours de sa vie pour toujours.En 1980, ce pilote syrien nommé Ragheed al-Tatari a pris une décision qui allait changer le cours de sa vie pour toujours.
Il n’a plus d’épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Aujourd’hui, c’est un sabre d’apparat qu’il soulève au-dessus de sa tête. Ce sabre honorifique, c’est celui que vient de lui remettre la ville de Hama en Syrie pour l’avoir épargnée il y a près de 43 ans. Une histoire hors du commun.
En 1980, ce pilote syrien nommé Ragheed al-Tatari a pris une décision qui allait changer le cours de sa vie pour toujours. À seulement 27 ans, il a refusé l’ordre de ses supérieurs de bombarder la ville de Hama pendant la violente répression des manifestations et de la rébellion à la fin des années 1970 et au début des années 1980 contre cette région par le parti au pouvoir.
Al Tatari a été libéré de la prison d’Adra, dont il est sorti en tant qu’homme libre pour la première fois depuis plus de quarante ans, il y a de ce quinze jours à peine. Sa libération a suivi la chute du régime d’Al Assad et la montée en puissance des forces d’opposition qui détiennent aujourd’hui le pouvoiren Syrie. Son refus de retourner son avion de chasse contre ses compatriotes syriens lui a coûté cher : des décennies d’emprisonnement et la séparation d’avec sa famille. Ce dernier a enfin regoûté à la liberté.
À l’époque, face à la pression croissante exercée sur lui pour qu’il se conforme aux ordres lors de ce qui est devenu « le massacre de Hama », organisé par le président de l’époque, Hafez Al Assad, Al Tatari a tenu, fidèle à ses principes et son éthique.
Condamné à 43 ans de prison par le régime Assad
Il a refusé de participer au bombardement de civils et a même rejeté les demandes d’information de ses collègues. Sa position de principe a conduit à son arrestation immédiate, à son expulsion de l’armée de l’air syrienne et à une courte période d’emprisonnement. L’histoire aurait pu s’arrêter là mais après une brève libération, au cours de laquelle il s’est rendu en Jordanie et en Égypte, Al Tatari est retourné à Damas. Sa liberté ne fut qu’éphémère. En 1981, les autorités du pays l’ont de nouveau arrêté, cette fois sans aucune forme de procès, le condamnant à une détention d’une durée… de 43 ans de prison !
Mais l’histoire n’en devient alors que plus tragique. Au moment de sa seconde arrestation, l’unique enfant du pilote tout jeune marié, était encore dans le ventre de sa mère… Al Tatari n’a pu rencontrer son fils qu’une seule fois… à l’adolescence. « J’ai vécu sans papa. Quand je suis né, en 1981, il était déjà en prison », raconte Waël Al-Tatari au Courrier international. « Petit, je ne savais même pas ce que voulait dire la prison. Je pensais qu’il était en voyage. » Une peine supplémentaire pour le pilote, héros d’un peuple qui ne connaissait même pas son existence.
Au cours de sa détention, Al Tatari a été transféré d’une prison à l’autre et a enduré les conditions inhumaines des centres de détention les plus célèbres de Syrie, notamment la prison de la Direction du renseignement militaire, la prison militaire de Mezzeh, la prison de Tadmor, la tristement célèbre prison de Sednaya et, enfin, la prison centrale d’Adra, où il a été libéré.