Ahmed Khalifa Niasse ne fait pas partie de ceux qui défendent la proposition de loi portant criminalisation de l’homosexualité. Bien au contraire ! Il fait partie des rares religieux à s’opposer à cette initiative. Mieux, il appelle à faire attention à ceux qu’il qualifie d’activistes “islamisants”. Voici le texte qu’il a publié à cet effet…
“Aujourd’hui, certains prieurs, sous l’appellation d’imams de mosquée, sont, en fait, des activistes qui cherchent à devenir une force ou un groupe de pression sur l’Etat, en prenant le peuple sénégalais en otage. Pour que, comme le disait quelqu’un, qui s’y frotte s’y pique. En réalité leur démarche viole un certain nombre de règles coraniques. La première c’est la Sourate 69 Al Khachia (l’inhibition ou l’inévitable) dans ses versets 21 à 26.
Il est évident que dans la société islamique (pas sénégalaise uniquement) il y a des faits et des actes qui vont dans le sens de la prohibition. Tels que : Le jeu de hasard, le commerce public de l’alcool, la cigarette (certains l’y ajoutent), la prostitution alimentaire, la viande de porc.
Sur le plan de la sexualité, il y a plusieurs interdits comme la zoophilie, la pédophilie, la nécrophilie… Pour ainsi dire que l’islam, dès son avènement, a averti le Prophète (Psl) par ce verset 21 de la Sourate 69 en lui disant : «Rappelle aux gens car tu n’es qu’un objecteur mais point un dictateur». Pourquoi l’islam n’a jamais obligé les gens à se comporter de telle ou de telle autre manière et qu’aujourd’hui on veuille les y obliger ? Pendant que nous y sommes, on peut faire des pétitions en se réclamant de la religion de Brigitte Bardot. Tout le monde sait ce qu’elle pense de la Tabaski comme fête. On sait aussi ce qu’en pensent les Hindous, les Bouddhistes…
Dans aucune société musulmane, le comportemental de l’individu n’est prohibé. Il est ouvert une porte pour les pécheurs : le repentir (demander pardon à Dieu). Et cette porte n’est jamais fermée jusqu’au dernier souffle. Pendant que nous y sommes, ces gens qui veulent faire passer une loi devant l’Assemblée viendront demain pour dire qu’il faut fermer les bars et autres dancings. Parce que tel hadîth ou verset va dans ce sens. Et que nous avons visité les familles religieuses et des enturbannés qui le pensent. Ils pourraient aller jusque dans les maisons pour vérifier si les hommes et les femmes qui y vivent ont un certificat de mariage ou pas. Ce sont les règles de la dictature qu’on veut faire exercer au nom de l’islam. Et à cela je dis non ! Ce n’est pour autant une approbation d’un quelconque comportement dévié. Comme l’alcoolisme, le jeu de hasard, l’homosexualité, la drogue…. C’est juste pour dire ce que le Khalife Omar avait dit : «Les Hommes sont nés libres. Depuis quand voulez-vous les ligoter, les réduire en esclaves?».
Aïcha, épouse du Prophète (Psl) devenue plus tard cheffe d’une armée d’hommes contre le Khalife Seydina Alioune, avait, un jour, posé une question au Prophète (Psl) : «Oh, Prophète de la meilleure oumah sur terre, comment peux tu conduire une société qui ne fait que pécher ?» Le Prophète (Psl) lui répondit : «Si la société ne commettait pas de péchés, Dieu serait tellement en colère qu’IL l’aurait fait disparaître pour amener une société qui pèche et se repent».
Pourquoi n’a-t-on pas récité les vrais versets coraniques qui laissent à l’homme sa liberté ? Et comme Juge Dieu. Et comme lieu l’au-delà. Je ne suis pas de ceux qui applaudissent à tout vent les faits et gestes du président de la République, que je soutiens pourtant. Et ici je lui demande de résister, au nom de l’Islam, à ces «déviationnistes» de la religion. Car, le code de bannissement de l’humain n’est pas coranique.
D’autre part, ce sera la porte ouverte à tous les abus. Car, il aurait suffi qu’une personne ait une gestuelle extérieure plus ou moins efféminée pour être taxée d’homme femme. Ou porteur de deux noms tel que les Wolofs aiment s’exprimer. Du temps du Prophète (Psl), il y avait des personnes efféminées. Mieux, le cinquième khalife était tellement efféminé qu’il était critiqué publiquement par ses amis qui étaient plus ou moins excentriques. Nous nous serons, alors, basés sur des suspicions. Et un verset coranique dit que la suspicion ne mène point à la vérité. Dans ce verset, il est dit qu’il y a des collectivités qui ne suivent pour les guider que la suspicion alors qu’elle ne mène jamais à la vérité. Alors que Dieu, Lui, sait ce que ces groupes, eux-mêmes, cachent.
Dans ces groupes, certains s’adonnent à ce qu’ils combattent. Peut être pour être au dessus de tout soupçon. D’autres sont des soulards notoires. Si on jouait à la traque des suspects, beaucoup parmi eux seraient épinglés.
Non, ne jouons pas à ce jeu. Il est trop malhonnête pour être islamique. Il est trop faux pour être vrai. La société se pervertit et s’auto-régule depuis toujours. Les pratiques homosexuelles sont antérieures à l’islam et se sont corrigées pendant des périodes. Et il en est ainsi. Il ne faut pas que les gens aillent chercher ce qui se trouve dans les égouts. Les places publiques fleuries, bien décorées existent. Les deux doivent coexister.
En islam, si votre voisin a un mauvais comportement essayez d’en avoir un meilleur. Et, un jour, même s’il n’atteint pas votre niveau il essayera de rejoindre le droit chemin. Dieu l’a dit dans un verset : «(Ceux qui dévient), Nous ne vous apporterons aucune nuisance tant que vous êtes sur le droit chemin». Laissons tranquilles les personnes qui dévient du chemin de Dieu et soyons sur le Droit Chemin. Dieu est le seul Juge. Et il y a un lieu où ne présentera aucun innocent.
Dans une fable religieuse, un homme se présente à Dieu et Lui dit qu’il n’a jamais commis le moindre péché. Et qu’il ne pouvait être condamné à l’enfer pour un quelconque péché car il n’en a commis aucun. Et, dans la même fable Dieu lui dit : «Par ton existence que tu acceptes et que tu affiches devant Moi tu as commis le plus lourd des péchés».
Tout le reste c’est du domaine de la politique. Si ces personnes pensent avoir un discours qui convainc le peuple elles n’ont qu’à créer ou rejoindre les partis politiques. Et présenter leur programme au peuple. Comme certains ont eu à le faire depuis les années 1970. En proclamant un Hezbollah au Sénégal, en brûlant le drapeau français, en exprimant par la plume ce qui ne devrait pas être.
Certes, les députés peuvent avoir un point de vue contraire par rapport à ce qui vient d’être dit. Mais, une fois de plus, ce ne sera qu’un point de vue. Qu’ils laissent, aussi, aux autres la liberté d’exprimer leur opinion.