A L uneACTUALITESinternationalPOLITIQUE

Mali: la Cédéao adopte de très lourdes sanctions contre la junte

L’organisation régionale était réunie en sommet extraordinaire à Accra, au Ghana, ce dimanche et a entériné les décisions prises par l’Union monétaire ouest-africaine, quelques heures plus tôt.

Pour amener la junte à un retour rapide à l’ordre constitutionnel, les pays ouest-africains réunis en sommet à Accra ont pris des sanctions économiques et financières très dures qui s’ajoutent aux précédentes.

La Cédéo a ainsi décidé de geler les avoirs maliens au sein de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO), de couper les aides financières, de fermer les frontières entre le Mali et les États membres de l’organisation, mais aussi de suspendre les transactions avec Bamako, à l’exception des produits médicaux et de première nécessité, les produits pétroliers et l’électricité, le gel des actifs et des avoirs de la République du Mali dans toutes les banques centrales des pays membres de la Cédéao, du gel des avoirs du gouvernement et des entreprises d’États maliens dans toutes les banques commerciales de la Cédéao.

La Cédéao a décidé par ailleurs le retrait des ambassadeurs de tous les pays membres au Mali, rapporte notre envoyé spécial à Accra, Peter Sassou Dogbé.

Enfin, les dirigeants décident d’activer immédiatement la force en attente de l’organisation, compte tenu de « l’impact potentiellement déstabilisateur de la transition malienne sur la région ».

Ce sont des sanctions économiques et financières

Le président de la commission de la Cédéao, Jean-Claude Kassi Brou, énumère le sanctions

Le sommet a constaté que la transition avait échoué en ne parvenant pas à organiser des élections à la date du 27 février 2022 comme convenu. Les diplomates estiment le chronogramme proposé par le Mali « inacceptable ». Un appel est lancé aux autorités de transition maliennes de suspendre les grandes mesures de réforme jusqu’à l’entrée en fonction des institutions légitimes qui seront mises en place après les élections. Le Mali, qui proposait une durée de transition de quatre ans, devra donc revoir sa copie.

« La main de la Cédéao n’a pas tremblé, celle de l’UEMOA non plus », s’est félicité un diplomate. En privé, deux chefs d’État interrogés par RFI expliquent que la junte malienne était allée « trop loin » et qu’il fallait montrer l’exemple. La population ne doit pas être victime de ces sanctions, insiste un diplomate interrogé par notre envoyé spécial Serge Daniel.

Ces mesures coup de poing ne ciblent que les militaires au pouvoir au Mali mais aucunement les civils, a tenu à préciser le président du Ghana, et président en exercice de la Cédéao, Nana Akufo-Addo :

[…] On voudrait avoir un espace démocratique en Afrique de l’ouest. On ne peut pas subir cette histoire de coup d’État qui se prolonge pendant cinq, six ans, ce n’est pas possible

Nana Akufo-Addo, président en exercice de la Cédéao

«Ils ont voulu nous tester»: le pari osé de la junte malienne

Avec notre correspondant à Bamako, Serge Daniel

Lorsque le médiateur de la Cédéao Goodluck Jonathan arrive à Bamako le 5 janvier dernier, un de ses collaborateurs fait un constat : la junte malienne demande en réalité une transition d’une durée de cinq ans, pour obtenir au moins trois ans. Les voyages du ministre malien des affaires étrangères Abdoulaye Diop, et ses déclarations sont minutieusement analysées dans la sous-région. L’idée de fermeté vis-à-vis de Bamako est décidée. Très rapidement de son côté, le président Roch Marc Kaboré, président en exercice de l’UEMOA, décroche son téléphone pour convoquer à Accra un sommet extraordinaire des chefs d’État des pays qui ont en commun le FCFA. Le sommet se tiendra le même jour que celui de la Cédéao et en présentiel et non en virtuel.

La veille du sommet, une délégation malienne vient sans surprise remettre un message au président du Ghana, président en exercice de la Cédéao. Au lieu d’une transition de cinq ans, la junte demande désormais quatre ans… « Ils ont voulu nous tester », analyse un interlocuteur. La même nuit, au cours d’un dîner, les chefs d’État déjà présents dans la capitale ghanéenne rejettent la nouvelle proposition malienne, et maintiennent leur position de fermeté. On connaît la suite.